RITUEL

Dans notre société actuelle, tout n’est qu’immédiat.
Les nouvelles technologies (entres autres), ont participé à l’accélération de notre rythme de vie.
L’individu ne se conçoit et ne se construit qu’en fonction de son futur proche, et de plus en plus rares sont ceux qui considèrent que leur mort ne sera pas la fin de toute chose.

C’est pourquoi je voudrais que l’on ralentisse, que l’on marque une pause.
Pour que l’individu puisse se rencontrer, se reconnaisse et battisse un avenir qui lui ressemble, pour lui mais aussi pour son espèce et pour le monde qui l’a vu naître et qui lui survivra.
Du brassage culturel dont je suis le fruit, je fais ressortir une esthétique ethnique, tribal,
couplée à des objets de notre quotidien dans le but d’insuffler de la poésie au cœur de notre temporalité dénuée de mysticisme.

Par cela je me pose en rupture avec la vitesse de notre époque et son consumérisme énoncés plus haut. Je veux prendre le temps, savoir le perdre pour mieux en user, permettre à l’esprit de reprendre son souffle pour que sa vie qu’il partage et déterminée par son corps, lui ressemble et le comble. Pour partager cela avec le spectateur, j’use de l’installation, du conditionnement d’un milieu. Je l’invite dans ce rituel, ce temps consacré, par le temps qu’il met à la disposition de sa déambulation dans ce lieu rituel.

Je ramasse, je collecte des fragments de notre présent,

Les lis, les lie, les assemble et les tisse,
Pour former une diversité “d’avatar” de notre devenir.

Je leur donne une légende, une dimension mystique, poétique,
et les appelle l’Oracle.
(Selon la définition: ”sanctuaire dans lequel on interrogeait la divinité, selon des formules rituelles.”)

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Mes "mobiles" sont fait d’ objets trouvés ou achetés de seconde main.
Ces produits sont issus de fabrication industrielle, sans personnalité propre, perdus dans la masse. Certains d’entre eux on une fonction décorative mais restent toujours dépourvus de toute valeur matérielle. Je me les réapproprie. Eux qui, par leur fonction, ne sont qu’éphémère et sans âme, je les transforme en squelette, en structure et en parure pour les idoles que je construit. Eux qui n’avaient pour tout destin que d’être usés puis détruits, je les charge de valeur, les rends immortels, les détourne de leur destin.
Ces objets sont le reflet de la vitesse folle de notre époque, tant par leur fabrication, que par le consumérisme intensif qui est leur seule raison d’être.

D’un point de vue formel, j’ai une préférence pour les objet circulaires, cylindriques, qui communiquent une certaine idée d’harmonie, de pureté, mais aussi de cycle, d’éphémère autant que d’infini. Je travaille en suspension, du haut vers le bas. Je me sert du poids, de la pesanteur des choses pour réaliser des masses (“avatars”) flottantes.
Le rapport pesanteur/apesanteur, terre/air m’intéresse beaucoup, il me permet de symboliser les rapports “permanent/éphémère”, “temps présent(réalité quotidienne)/temps suspendu”. La pause, le temps d’arrêt, suspendu, je le montre le donne et le pratique en utilisant une technique lente et laborieuse pour souder ces objets “immédiats” les uns aux autres: le tissage.

Je “re-sacralise” le temps de fabrication de l’objet
en le dépossédant de ses fonctions existentielles.

paradoxe=> rapidité/utile
lenteur/inutile

Voilà ce qui amène dans mon propos la notion de Rituel: le temps consacré à une activité ne donnant naissance à rien de matériel, de communément utile ou fonctionnel.